Tuesday, 21 April 2015

Les rois qui sommeillent



Agitant sur la dalle ardente de la plaine
Un hochet de poussière à manche d’osselets
Le vent se fraie sa piste et bouscule sans peine
Aux portiques un spectre en quête de palais

Des calottes glacées où souffle sa monture
On devine des coups, comme des bruits d’épée 
Qui cinglerait sans trêve un flanc de son armure
Ou de quelque étendard aux claquements butés
Dont  l’écho se partage et se perd…

Des guerriers sans race aux faces meurtrières
De leurs mollets sanglés qui dénigrent la selle
Ou de leurs poings flattant la frange des crinières
Retiennent de leur bête aux patiences rebelles
La masse trépidante et altière

En deçà des hauteurs où tournent ces fantômes
Et des âges perclus par des âges d’histoire
Il existe un passage où le vent s’abandonne
Aux pertes de mémoire
Et gonfle d’importance au risque de se rompre
En emplissant la gorge altérée des ravins
Où nulle armée ne passe

Il existe une passe
Ouvrant sur un plateau de jardins bordant l’ombre
D’une mosquée de gemme ourdie en son écrin

Des poètes y passent
Qui chantent les cyprès et les roses sans nombre
Dont  l’arôme est exquis et le bouquet divin
La caresse glacée d’un vaste bassin rose
Où parviennent aux femmes un pétale envolé
Des gerbes qu’ils proposent

Il existe une cour
Où les rois qui sommeillent en amont des gradins
Laissent au vent son cours
En s’étouffant des mains


Sylvie M. Miller

(30 Mars 1989)

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